La biodynamie et une nouvelle essence expérimentées en forêt de Châtenay

Ensemencement d’une fosse de plantation avec une solution enrichie en bactéries
Ensemencement d’une fosse de plantation avec une solution enrichie en bactéries (crédit photo: Reforest’Action)
La biodynamie et une nouvelle essence expérimentées en forêt de Châtenay

La biodynamie donne des résultats tangibles, selon Daniel Soupe :

« Aux abords du Futuroscope de Poitiers, par exemple, des arbres perdaient un mètre de flèche par an, et autant de branches charpentières. Nous y avons expérimenté la biodynamie, en lien avec le conseil départemental de la Vienne. Les arbres ont donné une croissance de 60 à 80 cm sans arrosage sur une année sèche. Les résultats sont aussi spectaculaires pour les racines. »

L’originalité du concept réside, d’après Daniel Soupe, dans la méthode :

« Nous ne vendons pas de bactéries, mais un service, une technique d’application, en introduisant des bactéries qui font déjà partie de la population locale, à même de s’adapter au milieu. Et de même avec les champignons. »

Des chênes venus de l’Est, face au changement climatique

La plantation comporte 500 chênes à feuilles de châtaignier (Quercus castaneifolia), a priori absent jusqu’alors des forêts françaises. Prometteur face au changement climatique, cet arbre, originaire du Caucase et du nord de l’Iran, est réputé résistant au stress hydrique, tandis que sa révolution est estimée à une cinquantaine d’années.

À la question de savoir s’il est possible d’introduire une nouvelle espèce de chêne en forêt, le ministère chargé de la Forêt nous répond :

« Il est possible de planter en forêt des espèces non réglementées par le code forestier. Ce que la réglementation impose est d’utiliser des matériels forestiers de reproduction (MFR) – pas du matériel ornemental ou fruitier – pour toute plantation en forêt d’espèces réglementées par le Code forestier. Pour les espèces non réglementées, les sylviculteurs utilisent des semences et plants non certifiés et sans traçabilité réglementaire. Pour le cas des chênes, espèces réglementées par le Code forestier, il y a utilisation obligatoire de MFR et des matériels de base inscrits au registre national des matériels de base des essences forestières. »

Le chêne à feuilles de châtaignier n’apparaît pas dans la liste des MFR. Il se rencontre en Europe de l’Ouest en milieu non forestier. Le parc botanique royal de Kew, au Royaume-Uni, revendique le plus gros spécimen au monde, d’une hauteur d’environ 35 mètres.

À Châtenay, il ne s’agit pas d’arbres d’ornement, mais bien d’arbres forestiers, assure Daniel Soupe :

« Je suis moi-même allé récolter le chêne à feuilles de châtaignier dans les montagnes d’Azerbaïdjan. C’est un chêne habitué aux fortes amplitudes thermiques, aux conditions extrêmes de froid, de chaleur, de sécheresse. Nous allons tester ses performances. »

Planter moins, planter mieux

Le projet de Châtenay opte pour une faible densité d’arbres. Il reste en deçà des préconisations ministérielles de 1 200 plants par hectare au minimum, dont 1 100 pour les essences-objectif (hors feuillus précieux, peupliers et noyers, et hors zone méditerranéenne).

Emmanuelle Unrein, du syndicat forestier, argumente :

« La biodynamisation a un coût. Plutôt que de se trouver avec un millier d’arbres le jour de la plantation et de les sélectionner pendant 50 ans, nous préférons en planter moins, mais plutôt des arbres de qualité qui se maintiendront dans le temps. »

Le financement de la plantation s’opère en partie via Reforest’Action (5Continents), à hauteur de 1,20 euro HT par plant pour les chênes. Selon Stéphane Hallaire, président de cette entreprise qui propose aux particuliers et au secteur privé de financer la plantation d’arbres :

« L’intérêt général porté par ce projet, à travers ses dimensions d’innovation, de forêt multifonctionnelle, de biodiversité, permet de mobiliser des entreprises en vue de financements. »

Deux sociétés soutiennent l’opération, soit le distributeur Carrefour et Unilever, groupe de cosmétique et d’agroalimentaire. Le coût total de l’initiative ne nous a pas été précisé.

Le pépiniériste Daniel Soupe doit désormais suivre l’évolution du sol. Le Centre régional de la propriété forestière (CRPF), en lien avec l’Institut pour le développement forestier (IDF), est censé participer au suivi scientifique du projet, en particulier en ce qui concerne la croissance des arbres.

Chrystelle Carroy/Forestopic

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