Bois reconstitués, lamellé-collé, contrecollé croisé, poutre en I…, les produits d’ingénierie sont de plus en plus présents sur les marchés de la construction. Ils accroissent les performances naturelles du matériau et ouvrent au bois de nouveaux marchés. Une révolution à découvrir dans le numéro d’avril 2019 de Forêts de France.
Qui pouvait imaginer il y a seulement 20 ans que l’on construirait à partir du matériau bois des immeubles de grande hauteur ? La tour en bois la plus haute du monde, à ce jour, culminera à 84 mètres en Norvège ! Comment est-on parvenu, à partir de la forêt, à un tel niveau de performance ? C’est la conjugaison de progrès techniques, qui a permis de sortir le bois de ses usages structurels traditionnels.
Le bois massif est, de fait, limité à la longueur de la grume entrée en scierie : une poutre équarrie ne fera pas plus de 4, 5 ou 6 mètres. Ces dimensions, qui ont nourri pendant des siècles la charpente traditionnelle, sont désormais largement dépassées. Par aboutage et collage de planches, l’industrie est capable de produire des poutres massives de 14 mètres de longueur aussi stables et solides que l’acier.
Le lamellé-collé, l’épicéa, le douglas et les feuillus
Le lamellé-collé a ouvert le champ des possibles au XXe siècle en offrant aux architectes l’opportunité de remplacer l’acier par le bois sur de longues portées. Depuis, les progrès n’ont pas cessé.
Les scieurs européens ont investi dans les outils pointus de seconde transformation pour mieux valoriser leurs produits : séchoirs, machines de classement mécanique du bois, chaînes de tri, de collage et de pressage. Les pays scandinaves, l’Allemagne, l’Autriche, les premiers, ont ainsi valorisé une ressource résineuse de qualité standard adaptée aux process industriels modernes.
La France est entrée dans la compétition plus tard. Plusieurs raisons à cela : le feuillu y domine dans les forêts et la ressource résineuse présente des caractéristiques hétérogènes. Si l’Hexagone rattrape son retard (les scieurs nationaux en produisent 94 000 m3 par an), la matière première entrant dans la composition des 200 000 m3 de lamellé-collé assemblés dans le pays est encore en majorité importée d’Europe du Nord. Ses lamelles d’épicéa homogène avec peu de nœuds offrent un rendement meilleur que l’épicéa français. L’enjeu, pour demain, consistera à développer l’usage du douglas, mais aussi des feuillus – le hêtre, le chêne et le peuplier.
Avec le CLT, un sandwich en bois
Le lamellé-collé a été inventé au début du XXe et le siècle s’est terminé avec l’émergence d’un produit tout en un : le panneau contrecollé croisé. Dans ce sandwich de sciages, le fait de croiser les couches à 90 degrés augmente la performance du bois. On préfabrique ainsi en usine des murs, des planchers, des toitures. Ce bois lamellé-croisé ou CLT, de l’anglais cross-laminated timber, permet aussi la construction de modules en trois dimensions – chambres d’hôtel, bureaux, studios pour étudiants – qu’il suffit d’empiler pour monter un immeuble sur plusieurs niveaux.
Après une tentative de développement en maison individuelle, peu concluante sur le plan économique, les constructeurs utilisent le CLT dans ces bâtiments à étages et, depuis peu, pour des constructions plus élevées. Le programme des immeubles à vivre en bois ADIVbois prévoit la construction en France de 13 bâtiments chargés de démontrer les capacités du matériau. Le plus haut comptera 15 étages ; la plupart utilise des panneaux de CLT.
Dans ce domaine, les industriels français préparent l’avenir. C’est le cas du vendéen Piveteau qui vient d’investir 15 millions d’euros dans une usine de fabrication de panneaux CLT. À terme, l’outil sera capable d’en produire 50 000 m3 par an, plus que la consommation actuelle de ces panneaux en France. Découvrez cette usine dans le numéro d’avril de Forêts de France.
Pascal Charoy (Forêts de France)