Une charte forestière pour le pays d’Épinal, terre de hêtre

Maison du vélo, hêtre utilisé en construction, Épinal
Maison du vélo, hêtre utilisé en construction, Épinal (crédit photo: J.-F. Hamard)
Une charte forestière pour le pays d’Épinal, terre de hêtre

Le pôle d’équilibre territorial et rural (PETR) du pays d’Épinal entend faire de la forêt et du bois un catalyseur de développement économique. Nouvelle étape sur cette route, la signature d’une charte forestière.

 

« La principale valeur ajoutée d’une charte forestière est la concertation entre les acteurs concernés par la forêt et la filière bois. »

Philippe Eymard, élu en charge de la politique bois au pôle d’équilibre territorial et rural (PETR) du pays d’Épinal (Vosges) l’a rappelé, lors de la présentation de cette charte signée le 25 novembre 2016. Le diagnostic réalisé en 2013 sur la filière forêt-bois et différents travaux conduits depuis 2010 visent à favoriser la recréation d’une industrie dynamique et innovante sur le territoire.

Le pays d’Épinal, au cœur des Vosges, est couvert à quelque 42 % de forêt (101 000 ha) avec un peuplement majoritairement de feuillus, des hêtres en particulier. Si cette ressource est considérée comme abondante avec une production de 190 000 m3/an, encore fallait-il la mobiliser.

Excellence rurale sur les bois de feuillus

La charte forestière doit ancrer les actions entreprises ces dernières années et réunir les acteurs qui interviennent sur cette filière. Il s’agit de soutenir les entreprises locales, valoriser la transformation locale de la ressource, et mettre en phase l’exploitation de la forêt et les besoins des scieries.

L’alarme est donnée avec le dépôt de bilan de six importantes scieries entre 2009 et 2011. Ces échecs provoquent un électrochoc et les élus et les professionnels de la filière, publics et privés, se mobilisent pour dessiner un autre avenir. Leur travail commun aboutit à l’obtention en 2011 du label « pôle d’excellence rurale » (PER) sur la thématique des bois de feuillus. Un label qui s’est accompagné d’une enveloppe de l’État de 1,3 million d’euros, complétée par des financements locaux (département des Vosges et région Grand Est), et européens. Ce sont plus de 4,7 millions d’euros qui ont été investis dans plusieurs projets destinés à redynamiser la filière du hêtre dans sa totalité, jusqu’à la transformation.

Un traitement thermique pour le bois de hêtre
Le hêtre produit un bois fragile face aux champignons ou aux termites. Ses déformations sont élevées lors de la phase de séchage et il se montre sensible aux variations d’humidité. Pour traiter ces problèmes, le bois est soumis à un cycle de chauffage et de refroidissement en milieu contrôlé en oxygène et en humidité. Le procédé retenu agit sur le plan moléculaire par la modification de la structure cristalline du bois, grâce à une dégradation contrôlée de la cellulose. Ce traitement a pour conséquence une diminution du caractère hydrophile du bois, une résistance accrue aux champignons mais également un amoindrissement de la résistance mécanique des produits traités.

Une marque collective en vue de valoriser le hêtre

La marque Hêtre des Vosges, créée en 2012, se destine à inscrire la volonté collective de valoriser le bois de hêtre, dans le secteur de l’ameublement, et aussi dans la construction, l’emballage, la chimie verte. Épinal accueille des structures universitaires et des centres techniques, l’Enstib*, le Lermab* et le Critt* bois, ce qui participe des échanges entre les acteurs.

Le bois est issu du territoire et pour bien marquer cette provenance, la marque collective prend le nom de Terres de hêtre en 2013, destinée à développer le réseau d’innovation et de commercialisation des produits à base de hêtre. Cette marque s’adresse aux producteurs, transformateurs et fabricants « qui s’engagent dans une démarche de valorisation des bois de hêtre provenant du patrimoine forestier français, géré de façon durable ».

Sylviculture dynamique, transformation du bois

Les propriétaires et gestionnaires des forêts, publiques à 70 % et privées à 30 %, qui rejoignent la charte forestière s’inscrivent dans une sylviculture dynamique, destinée à améliorer la qualité du bois et à sécuriser l’approvisionnement des entreprises. L’enjeu de la charte est aussi, pour les petites surfaces privées, d’encourager leur restructuration. Le morcellement de la forêt privée est vu comme un frein à la gestion forestière et à la mobilisation du bois.

Autre enjeu d’importance, celui de reconstituer le tissu professionnel aval avec des entreprises locales de première et deuxième transformation, d’assurer la formation des artisans et des constructeurs et de sensibiliser les architectes et les bureaux d’étude.

La charte forestière du pays d’Épinal doit dorénavant régir les actions communes portant sur l’environnement et le climat, autant que l’économie locale et le social.

Martine Chartier/Forestopic

* Acronymes
Enstib : École nationale supérieure des technologies et industries du bois.
Lermab : laboratoire d’études et de recherche sur le matériau bois (université de Lorraine).
Critt : centre régional d’innovation et de transferts technologiques.

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