Sous pression sociétale, l’ONF change sa façon de couper et vendre du bois en Île-de-France

Forêt de Cheptainville, Île-de-France
Forêt de Cheptainville, Île-de-France (crédit photo: droits réservés)
Sous pression sociétale, l’ONF change sa façon de couper et vendre du bois en Île-de-France

Pour continuer à gérer les forêts d’Île-de-France de manière acceptable par les riverains, l’Office national des forêts prend la main sur le façonnage du bois. Les exploitants forestiers s’inquiètent.

 

« Produire du bois devient de plus en plus compliqué en Île-de-France, avec des réactions parfois épidermiques des riverains. Si nous continuons comme aujourd’hui, nous n’atteindrons pas la moitié des quantités de grumes que nous sortons actuellement des forêts. »

Benoît Fraud, à la tête de la direction commerciale bois et services de l’Office national des forêts (ONF), décrit ainsi les difficultés rencontrées dans l’exploitation des forêts périurbaines de la région capitale. D’où la décision de l’ONF de commercialiser, par contrat, 100 % du bois issu des forêts publiques franciliennes. Autrement dit, exit les ventes aux enchères de bois sur pied, pour privilégier la contractualisation, synonyme de commercialisation du bois déjà coupé.

« Mieux communiquer sur les chantiers »

Benoît Fraud poursuit :

« Nous répondons à une demande de collectivités de mieux contrôler la qualité des exploitations forestières. Cela implique de mieux communiquer sur les chantiers, ce qui requiert plus de planification. Or, dans le cas du bois sur pied, il est moins facile de maîtriser les dates de vente. »

Cette trajectoire se situe dans le long terme, sans échéance précise, et doit d’abord porter sur « les coupes les plus délicates », selon le responsable de l’ONF.

La relation avec le public est une préoccupation partagée par les entreprises de travaux forestiers, qui plus est dans une région urbanisée comme l’Île-de-France. Tammouz Eñaut Helou, chargé des travaux et services forestiers et ruraux à la Fédération des entrepreneurs des territoires (FNEDT), suggère de « faire de la pédagogie afin d’expliquer le pourquoi de l’abattage et du débardage ».

Et de relever d’autres spécificités franciliennes, comme « la difficulté de travailler en forêt le mercredi [un jour susceptible d’être consacré aux loisirs], les embouteillages, les frais de logement ».

La FNB demande une médiation des pouvoirs publics

L’annonce de l’ONF fait l’effet d’une douche froide parmi les exploitants forestiers qui craignent de se voir privés d’un accès à la ressource en bois. Toutefois, lorsque l’ONF exerce la maîtrise d’ouvrage du façonnage, l’abattage et le débardage sont assurés par ses propres techniciens, « de façon minoritaire » selon Benoît Fraud. Ou alors, l’Office sous-traite ces opérations à des entreprises d’exploitation forestière.

La Fédération nationale du bois (FNB), s’interroge sur cette mesure « prise sans concertation ». Une référence à la charte sur la commercialisation du bois, signée par l’ONF, la FNB et les communes forestières (FNCOFOR). Cet accord a récemment intégré les grumes de chêne. Il prévoit que des discussions viennent préciser les taux de contractualisation pour chaque région, relève la FNB.

La fédération en appelle à une médiation des pouvoirs publics.

Contractualisation versus approvisionnement en bois

La FNB s’est aussi engagée pour la contractualisation dans le cadre de la charte nationale adoptée sous l’égide du comité stratégique de filière (CSF bois). Sécuriser les approvisionnements des industriels en est l’un des objectifs affichés. Cependant, Nicolas Douzain, délégué général de la FNB, veut nuancer :

« Un scieur cherche l’équilibre dans son approvisionnement, entre le bois sur pied qu’il exploite lui-même de la façon qui l’intéresse et le bois qu’il achète déjà coupé. »

Pour ce qui est de l’Île-de-France, l’ONF et l’Agence régionale des espaces verts (AEV) se tournent, dans la même veine, vers la sylviculture dite irrégulière, exempte de coupes rases.

Chrystelle Carroy/Forestopic

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