L’évolution des conditions climatiques contribue à fragiliser les arbres. Stress hydrique et ravageurs provoquent plus ou moins de dégâts, en fonction des essences et des territoires notamment.
Une « mortalité en progression » se décèle parmi les arbres des forêts de France métropolitaine, selon l’IGN. Elle s’explique par des « crises sanitaires liées à des conditions climatiques à la fois difficiles pour les arbres (sécheresses) et propices aux insectes xylophages, notamment les scolytes », indique l’institut.
La forêt métropolitaine n’en continue pas moins de s’étendre en surface. Elle couvre désormais 16,9 millions d’hectares.
Une surmortalité encore peu visible dans les chiffres
Cette tendance à la surmortalité ne se retrouve pas dans les chiffres. Le Mémento 2020 de l’inventaire forestier vient de paraître et porte sur la période 2010-2018 ; il évalue la mortalité des arbres à 8,8 millions de m³ par an, soit 0,6 m³ par hectare et par an, sans compter les arbres que le vent ou la neige a fait chavirer (chablis). Cette mortalité s’élève à 10,2 millions de m³ par an dans le Mémento 2019.
« La période récente présente une mortalité accrue, mais cette hausse est encore peu visible dans les résultats standard »,
De plus, l’IGN a modifié sa façon de produire les chiffres. Un « arbre vu mort » reçoit deux visites de terrain au lieu d’une, afin de mieux dater son évolution. En outre, « seul le flux des arbres vivants sur pied devenus morts a été conservé. Le flux des vivants devenus chablis (fortement penchés) vivants ou morts a été exclu. »
Cette létalité touche en particulier le châtaignier, de manière stable, mais notable dans le Sud-Ouest et le pourtour du Massif central. Elle atteint le frêne dans le grand quart Nord-Est, alors que la chalarose s’étend. Le pin sylvestre n’est pas épargné. La crise des scolytes de l’épicéa « n’apparaît pas encore pleinement dans les résultats », mais elle devrait être visible dans les futurs inventaires.
Une « succession inédite » d’étés chauds et secs
En parallèle, le département de la Santé des forêts (DSF) vient de publier son bilan pour l’année 2020 et observe une « succession inédite » d’étés caniculaires et secs depuis 2018. Au global, un cumul de déficit hydrique peut affaiblir la vitalité des arbres, les rendre plus vulnérables aux attaques de ravageurs.
Comme le fait remarquer Météo France, parmi les dix années les plus chaudes depuis 1900, neuf appartiennent au XXIe siècle, dont sept se trouvent dans la dernière décennie : 2020, 2018, 2014, 2019, 2011, 2003, 2015, 2017 et 2006.
Selon le DSF, la chalarose du frêne atteint les Pyrénées, l’encre du châtaignier se répand dans le nord-ouest de la France. Un organisme émergent, la cécidomyie des aiguilles du douglas, se propage, en particulier en Bourgogne-Franche-Comté, avec un impact sur l’essence encore difficile à appréhender.
Quant au scolyte de l’épicéa (typographe, voire chalcographe), il a colonisé 10 millions de m³ de bois. Dans les massifs du Jura et des Vosges, la vigilance est de mise à l’égard d’un autre scolyte de l’épicéa, Ips duplicatus, apparu notamment en Suisse mais non détecté en France.
Le chêne connaît des dégâts localisés, suite à trois années de sécheresse entre 2018 et 2020, « mais cela représente un enjeu économique fort ». Déjà observés par le DSF ou par les experts forestiers, des dépérissements de hêtre se confirment. Les mortalités de pin sylvestre « ont explosé », estime le DSF.
La santé et la vitalité des forêts font partie, par ailleurs, des indicateurs de gestion durable (IGD) suivis par l’IGN. La dernière édition des IGD, en 2015, faisait état d’une situation plutôt satisfaisante au global. La prochaine mise à jour (IGD 2020) doit faire l’objet d’une publication prévue en avril 2021.
Chrystelle Carroy/Forestopic
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